Question-réponse 25

Le Soufisme est-il une hérésie dans l’Islam ? Et pourquoi les savants de toutes les époques l’ont condamné ?

REPONSE

Il existe parmi les membres de cette noble communauté, une catégorie particulière de croyants qu’Allah a favorisés. Ce sont ceux qui ont parcouru avec abnégation les trois étapes qui composent la religion (Din) : El Islam – El Iman – El Ihsan. Ils se sont parfaits spirituellement en arpentant les pentes abruptes de l’effort intérieur, domaine qui est la spécialité des Moujtahid dans le domaine de l’Ihsan et qui furent nommés les Soufis. Ce sont ceux qui sont préoccupés à se purifier. Ils se souviennent de leur Seigneur en tous lieux et en tout moment en invoquant Ses Noms et Attributs, et ils sont attentifs dans leurs prières. Ceci est l’essence du Tassawwouf, et aussi l’essence de l’Islam.

Allah (Glorifié et Exalté) dit :

« Notre Seigneur ! Envoie l’un des leurs comme messager parmi eux, pour leur réciter Tes versets, leur enseigner le Livre et la Sagesse, et les purifier » (Sourate 02 La vache, verset 129).

« Ainsi, Nous avons envoyé parmi vous un messager de chez vous qui vous récite Nos versets, vous purifie […] » (Sourate 02, verset 151).

« Réussis, certes, celui qui se purifie, et se rappelle le Nom de son Seigneur, puis prie » (Sourate 87 Le Très-Haut, versets 14 et 15).

« […] Et quiconque se purifie, ne se purifie que pour lui-même, et vers Allah est la Destination » (Sourate 35 Le créateur, verset 18).

Ibn Qayyim al-Jawziyya dit dans «Al-Fawa‘id»:

« Allah dit : « Et quant à ceux qui luttent pour Notre cause, Nous les guiderons certes sur Nos sentiers » (29 ; 69). Il a ainsi défini la direction du jihad. Partant de là, les meilleurs sont ceux qui luttent le plus pour Sa cause, et le jihad le plus important est le jihad contre l’ego (afrad al-jihad), le jihad contre les désirs, le jihad contre Satan et le jihad contre le bas monde (jihad an-nafs wa jihad al-hawa wa jihad ach-chaïtan wa jihad ad-dunya). Quiconque lutte contre ces quatre jihad, Allah le guidera aux voies de Son bon plaisir qui conduit à Son Paradis, et quiconque abandonne le jihad, alors il renonce à être guidé en proportion de son abandon au jihad ».

Combien est-il consternant de voir avec quel entêtement les détracteurs s’acharnent à vouloir les rendre méprisables au regard de la masse, usant de tous les stratagèmes possibles et inimaginables afin qu’ils ne soient plus considérés ni appréciés, voulant à tout prix les présenter comme des éléments parasites et étrangers aux enseignements de l’Islam.

Alors qu’en réalité, ils sont autant indissociables de l’essence même de cette religion que ne l’est l’esprit pour le corps, et bien qu’ils espèrent les rendre incompatibles et opposés aux domaines de la Loi, ils en sont bien au contraire la réalisation la plus pure.

Combien de fois leurs dénigreurs tentèrent de n’exposer à la connaissance du commun que conflits entre ceux-là et les maîtres juridiques de la Loi désirant par là, les déprécier au regard du profane alors que de tout temps et dans toutes les disciplines, ils reçurent les témoignages favorables même des plus intransigeants et en voici, à la suite, un léger aperçu parmi les savants les plus réputés et universellement reconnus dans le monde musulman :

– Imam Abou Hanifa (décédé en 150 de l’Hégire)

Ibn ‘Abidin rapporte, dans son al-Dourr al-moukhtar, que l’Imam Abou Hanifa a dit : « Si ce ne fut pas pour deux années, j’aurais péri ».

Ibn ‘Abidin commente :

« Pendant deux années, il accompagna Seïdina Ja‘far al-Saddiq et il acquit la connaissance spirituelle qui fit de lui un gnostique dans la Voie… Abou ‘Ali Daqqaq (le cheikh de l’Imam Qouchayri) reçut l’initiation d’Abou al-Qasim al-Nasiribadi, qui la reçut de Chibli, qui la reçut de Sari al-Saqati, qui la reçut de Ma‘rouf al-Karkhi, qui la reçut de Daoud at-Ta‘i, qui reçut les deux connaissances, l’interne et l’externe de l’Imam Abou Hanifa ».

– Soufyan al-Thawri (d.161H)

Ibn Qayyim al-Jawziyya rapporte, dans Madarij al-salikin, et Ibn al-Jawzi, dans le chapitre intitulé « Abou hashim al-Zahid » dans son Sifat al-safwa, d’après le maître de hadiths Abou Nou‘aym, dans son Hilyat al-awliya, que Soufyan al-Thawri a dit :

« Si ce n’était pas à cause d’Abou Hachim al-Soufi (d.115H), je n’aurais jamais perçu la présence des plus subtiles formes d’hypocrisie en moi… Le meilleur est le Soufi érudit en jurisprudence ».

– Imam Malik (d. 179H)

Le savant de Médine fut connu pour sa grande piété et son amour pour le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Il l’aimait et le vénérait à tel point qu’il ne montait jamais à dos de son cheval dans les limites de Médine en guise de respect à la terre qui contenait le corps du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Il ne rapportait aucun hadith sans avoir parfait d’abord son ablution. Ibn al-Jawzi rapporte, dans son livre Sifat al-sawfa:

Abou Mous‘ab dit : « J’entrais pour voir Malik ibn Anas. Il me dit : « Regarde à ma place de prière (ou sous ma natte de prière) voit ce qu’il y a ». Je regardais et j’y trouvais une certaine écriture. Il me dit : « Lis-la ! ». Je constatais qu’elle contenait le récit d’un rêve que l’un de ses frères avait fait et qui le concernait. Il dit (lisant ce qui était écrit) : « Je vis le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dans mon sommeil. Il était dans sa mosquée et les gens étaient autour de lui, et il dit : « J’ai caché sous ma chaire (minbar) une bonne chose – ou une connaissance – et j’ai ordonné à Malik de vous la distribuer. » Malik alors pleura, je me levais et pris congé de lui ».

Juste comme Abou Hanifa et Soufyan al-Thawri implicitement affirmèrent la nécessité de suivre la voie soufie afin d’acquérir la perfection, l’Imam Malik ordonna explicitement la pratique du Tassawwoufdans sa déclaration suivante comme un devoir des savants :

« Quiconque pratique le Tassawwouf sans étudier la Loi Sacrée (la jurisprudence) corrompt sa foi, alors que quiconque étudie la Loi Sacrée (la jurisprudence) sans pratiquer le Tassawwouf corrompt sa moralité. Seulement celui qui combine les deux atteindra la vérité »

Cette déclaration est rapportée par le Mouhaddith Ahmad Zarrouq (d.899H), le Hafidh ‘Ali al-Qari al-Harawi (d.1014H), les Mouhaddith ‘Ali ibn Ahmad al-‘Adawi (d.1190H) et Ibn ‘Ajiba (d.1224H) et d’autres.

Alors comment, après une telle déclaration de l’Imam Malik, penser qu’il n’a pas eu lui-même de maître en la matière. Bien au contraire, parmi l’ensemble de ses maîtres, qu’il a cité, se trouvait Ibn Hourmouz, connu pour sa grande piété et qui l’a particulièrement marqué. Or, curieusement, il a dit à son sujet : « J’ai acquis auprès d’Ibn Hourmouz, et pendant seize ans, une science que je n’ai révélée à personne ».

– Imam Chafi’i (d.204H)

Al Hafidh al-Souyouti rapporte, dans Ta’yidal-haqiqa al-‘aliyya, que l’Imam Chafi‘i a dit :

« J’accompagnais les soufis et reçus d’eux trois mots : leur déclaration que le temps est un sabre : si tu ne le coupes pas, il te coupe ; leur déclaration que si tu ne préoccupes pas ton ego avec la vérité, il te préoccupera avec le mensonge ; leur déclaration que la privation est une immunité ».

Le Mouhaddith al-‘Ajlouni rapporte aussi, dans son livre Kachf al-Khafa wa mouzil al-albas, que l’Imam Chafi‘i dit :

« Trois choses m’ont plu dans ce monde : éviter l’affection, traiter les gens avec indulgence et suivre la voie du Tassawwouf »

– Imam Ahmad ibn Hanbal (d.241H)

Mohammad ibn Ahmad al-Saffarini al-Hanbali (d.1188H) rapporte, dans son Ghidha ‘ al-albab li-charh manzoumat al-adab, de la part d’Ibrahim ibn ‘Abd Allah al-Qalanassi, que l’Imam Ahmad dit au sujet des Soufis:

« Je ne connais pas de gens meilleurs qu’eux » Quelqu’un lui dit : « Ils écoutent la musique et ils atteignent des états extatiques ». Il dit : « Est-ce que tu les empêches de se réjouir quelque temps avec Allah ? ».

Cheikh Amin al-Kourdi dit :

« L’Imam Ahmed conseillant son fils lui dit : « ô fils, tu dois tenir compagnie avec les gens qui pratiquent le soufisme parce qu’ils sont une fontaine de savoir et leurs coeurs sont en constante invocation. Ils sont les ascétiques, et ils ont le plus puissant pouvoir spirituel ».

Quelques-uns ont voulu s’appuyer sur un certain différend entre l’imam Ahmad et le soufi Al Mouhassibi pour prétendre qu’Ahmad mettait en garde contre les soufis. Or, le renommé savant Al-Soubki avertit :

« Prenez garde d’écouter ce qui s’est passé entre Abou Hanifa et Soufyan al-Thawri, ou entre Malik et ibn Abi Dhi’b, ou entre Ahmad ibn Salih et al-Nassa‘i, ou entre Ahmad ibn Hanbal et al-Harith al-Mouhassibi (et autres dans les temps ultérieurs). Si vous êtes affairés avec cela, je crains la mort pour vous. Ceux-là sont les notables en religion et leurs paroles ont plusieurs explications que certains ont peut-être mal comprises. En ce qui nous concerne, nous n’avons rien d’autre qu’à approuver ce qu’ils ont dit et de ne rien dire concernant ce qui a eu lieu entre eux, comme ce qui s’est passé entre les Compagnons, qu’Allah soit satisfait d’eux… ô toi qui cherches à être guidé ! Consacre-toi à la voie des bonnes manières avec les maîtres passés, évite de creuser dans leurs divergences sauf ce qui est le produit d’une claire démonstration. Si vous êtes capables d’y appliquer une bonne interprétation, faites-le, dans le cas contraire, laissez ce qui a eu lieu entre eux, et préoccupez-vous de ce qui vous concerne, et laissez ce qui ne vous concerne pas ! »

– L’Imam Abou Mansour ‘Abd al-Qahir al-Baghdadi (d.429H)

L’un de ceux qui possédaient la connaissance, couvrant les diverses vues et croyances des groupes des musulmans et non-musulmans, il écrit dans son Farq bayn al-firaq:

« Sachez que Ahl al-Sunna wa al-jama’a est divisé en huit groupes de gens… le sixième groupe étant les Soufis Ascétiques (al-zouhhad al-soufiyya), qui ont vu des choses pour ce qu’elles sont et malgré tout, s’en sont abstenus, qui ont connu par expérience et cependant, sont fidèlement prudents, qui ont accepté ce qu’Allah leur a assigné et se contentent avec ce qui est à leur portée. …… Ils ont compris qu’entendre, voir, et penser est compté pour leurs bonnes et mauvaises actions et sont sujet à une estimation du poids d’un atome. En conséquence, ils se sont sécurisés avec la meilleure sécurité en préparation pour le Jour du retour. Leurs discours ont parcouru les deux voies des préceptes et allusions subtiles à la manière des Gens de Hadith mais sans la poursuite de discours futiles. Ils ne cherchent ni à se faire voir dans la pratique des bonnes actions ni dans l’abandon des bonnes actions par timidité. Leur religion est la déclaration de la ténacité et le désavouement de la similitude. Leur école est l’engagement dans les devoirs d’Allah, dépendre de Lui, la soumission à Ses ordres, la satisfaction avec ce qu’ils ont reçu de Lui, et référer toute leur objection à Lui. « Telle est la grâce d’Allah, Il la donne à qui Il veut. Et Allah est le Détenteur de l’énorme grâce » (57 ; 21). »

– L’Imâm Al-Ghazâli (d.505H)

Et voilà les propos de l’Argument de l’Islam, Abou Hamid Al-Ghazali, que Dieu lui fasse miséricorde, lorsqu’il a parlé, dans son livre Al-Munqidh min Ad-Dalâl, des Soufis, de leur comportement et de leur voie authentique menant à Dieu : « J’ai su avec certitude que les Soufis sont les itinérants vers Dieu, que leurs historiques sont les meilleurs de tous, leur voie est la plus correcte de toutes et leurs manières sont les plus nobles et les plus pures ».

Puis il a répondu à ceux qui critiquent les Soufis et les attaquent : « En somme, que diront ceux-là d’une voie dont la purification – qui en est la condition première – consiste à purifier le coeur entièrement de tout ce qui est autre que Dieu – Exalté soit-Il ? Que diront-ils d’une voie dont la clef est l’entière absorption du coeur dans la mention de Dieu et son terme est l’entière extinction (Fanâ’ bil-Kuliyyah) pour Dieu ? ».

– Imam Fakhr al-Din Razi (d.606H)

Un savant Chafi‘i de génie et un Imam moujtahid en doctrine de la foi, il fut parmi les figures les plus en vue de son temps dans la maîtrise de la logique et les sciences traditionnelles islamiques, et il préserva la religion d’Ahl al-Sunna de la déviation des sectes aberrantes de son temps.

Il rédigea, dans son I‘tiqadat firaq al-mouslimim wa al-mouchrikin :

« Le sommaire de ce que disent les Soufis, c’est que la voie de la connaissance d’Allah est l’auto-purification et le renoncement à l’attachement matériel, et ceci est une excellente voie… Les Soufis sont un groupe qui travaille avec réflexion sur le détachement de soi et des pièges de la vie matérielle. Ils luttent afin que leurs coeurs soient uniquement occupés avec le souvenir d’Allah dans toutes leurs besognes et actions, et ils sont caractérisés par la perfection de leurs manières dans les relations avec Allah. En vérité, ce sont les meilleurs de toutes les races des êtres humains ».

– Sultan al-‘Oulama’ al-‘Izz ibn ‘Abd al-Salam al-Soulami (d.660H)

Son surnom est « Le Sultan des Savants ». Le Cheikh al-Islam de son temps étudia le hadith sous le Hafidh al-Qassim ibn ‘Ali ibn ‘Assakir al-Dimachqi, et le Tassawwouf sous le cheikh al-Islam Chafi‘i Chihab al-Din al-Suhrawardi (539-632H), lequel al-Dhahabi appelle : « Le cheikh, l’imam, le savant, le zahid, le connaisseur, le mouhaddith, le Cheikh al-Islam, le hors pair des Soufis… ». Il étudia aussi sous Abou al-Hassan al-Chadhili (d.656H) et son disciple al-Mursi. L’auteur de Miftah al-sa‘ada et al-Soubki dans son Tabaqat, rapportent qu’Al-‘Izz disait à chaque fois qu’il entendait al-Chadhili et al-Mursi parler : « Ceci est le genre de discours qui vient fraîchement d’Allah ».

Dans ses deux volumes, Qawa‘id al-ahkam fi massalih al-anamsur ousoul al-fiqh, il mentionne que les Soufis sont ceux au sujet desquels Allah dit : « Le parti d’Allah » (5 ; 56-58 ; 22). Il définit le Tassawwouf comme « l’amélioration des coeurs à travers lesquels la santé des corps est saine et à travers lesquels les maladies des corps sont des maux » Il considéra la connaissance des règles légales externes comme une connaissance de la Loi dans ses généralités, tandis que la connaissance des matières internes est une connaissance de la Loi dans ses détails les plus fins.

Al-‘Izz ibn ‘Abd al-Salam fut questionné, dans sa Fatwa, au sujet de la validité des déclarations de Qouchayri et Ghazzali « que le plus haut niveau parmi les serviteurs d’Allah après les Messagers et Prophètes (paix sur eux) est celui des saints (awliya), suivi de celui des savants (‘oulama) ».

Il répondit : « Concernant la priorité des connaisseurs d’Allah sur les connaisseurs des lois d’Allah, les dires des maîtres Qouchayri et Abou Hamid (al-Ghazali) sont confirmés. Aucune personne, dotée de sens, ne doute que les connaisseurs d’Allah… non seulement, sont meilleurs que les connaisseurs des lois d’Allah, mais sont aussi meilleurs que ceux qui connaissent les branches et les racines de la religion, parce que le rang d’une science est selon ses buts immédiats…

La plupart du temps, les savants sont voilés par leur connaissance qu’ils ont d’Allah et de Ses attributs. Autrement dit, ils seraient parmi les gnostiques dont la connaissance est continue, comme cela convient à la demande de la vraie vertu. Et, comment les gnostiques et les juristes peuvent être les mêmes quand Allah dit : « Le plus noble parmi vous, auprès d’Allah est le plus pieux » (49:13) ?… et, par les « savants » (‘oulama), quand Il dit « Parmi Ses serviteurs, seuls les savants craignent Allah » (35 ; 28). Il fait cas de ceux qui Le connaissent, de même que Ses attributs, et Ses actions, et non ceux qui connaissent Ses lois… Un signe de la supériorité des gnostiques par rapport aux juristes est qu’Allah fait des miracles aux mains des premiers, mais jamais aux mains du deuxième groupe, à l’exception de ceux qui entrent dans la voie des gnostiques et acquièrent leurs caractéristiques ».

Ce ne fut pas nécessaire qu’Al-‘Izz introduise les savants de hadiths dans la mesure où ceux-ci sont considérés d’un niveau inférieur aux savants de fiqh et sont, par conséquent, inclus avec eux en dessous des saints. Ibn Abi Zayd al-Maliki rapporte que Soufyan ibn ‘Ouyayna a dit : « Le hadith conduit à l’égarement sauf pour les juristes (fouqaha) » et le compagnon de Malik, Ibn Wahb a dit : « Tout maître de hadith qui n’a pas d’Imam en fiqh est égaré (dall). Si Allah ne nous avait pas sauvés avec Malik et al-Layth, nous aurions été égarés ». Nous avons déjà mentionné l’avertissement de l’Imam Malik : « que la religion ne consiste pas en la narration de quantité de hadith mais plutôt en la lumière qui prend siège dans la poitrine ».

– L’Imâm An-Nawawi (d.676H)

L’Imam Nawawi, que Dieu lui fasse miséricorde, dit dans son épître Al-Maqâsid :

« Les fondements de la Voie du Tassawwouf sont au nombre de cinq :

1. La crainte révérencielle envers Dieu, et ce, en public comme en privé.

2. Suivre la Sunnah dans les oeuvres et les paroles.

3. S’écarter des futilités des gens et ne pas avoir recours à eux.

4. Etre satisfait de Dieu, qu’Il te donne peu ou modérément.

5. Avoir toujours recours à Dieu dans les moments heureux comme dans l’adversité ».

– Ibn Taymiyya (d.728H)

Cet Imam est celui qui est le plus cité par les détracteurs pour prétendre à l’hérésie du Soufisme et de ses maîtres alors que sa position était plutôt celle de quelqu’un voulant épurer le Soufisme authentique des déviations, des abus et des charlatans. Il est vrai que sa position, aussi bien que sa méthode reste très ambiguë et prête à confusion, mais il ne fait aucun doute qu’il considérait le Tassawwouf comme partie intégrante de l’Islam et qu’il s’en réclamait aussi, en voici quelques lignes.

Au sujet du fana’ – un terme utilisé par les Soufis signifiant littérairement l’extinction ou l’auto-extinction – et le chatahat ou les déclarations extatiques des Soufis, Ibn Taymiyya dit :

« Cet état d’amour caractérise plusieurs des Gens amoureux d’Allah et les Gens de la Recherche (Ahl al-irada). Un homme s’évanouit dans l’objet de son amour – Allah – à travers l’intensité de son amour. Il se souviendra d’Allah et non de lui-même, invoquera Allah et non lui-même, prendra Allah à témoin et non lui-même, existe en Allah et non en lui-même. Lorsqu’il atteint cet état, il ne ressent plus sa propre existence. Ceci est la raison pour laquelle il peut dire dans cet état : ana al-haqq (Je suis la Vérité), ou soubhani (Gloire à moi !), et mafi al-joubba illa Allah (Il n’y rien dans ce manteau sauf Allah) parce qu’ivre dans l’amour d’Allah, ceci est un plaisir et une joie qu’il ne peut contrôler…

Ce phénomène est, en lui-même, à la fois vérité et mensonge. Mais lorsque quelqu’un entre dans un état d’amour extatique (‘ichq) pour Allah, il atteindra un état d’absence d’esprit, et lorsqu’il est dans un tel état, il ne verra pas comment il accepte le concept d’ittihad (l’union avec Allah). Je ne considère pas cela comme un péché parce que cette personne est innocente et nul ne peut la punir parce qu’elle n’a pas conscience de ce qu’elle fait. Le calame ne condamne pas l’insensé sauf lorsque son esprit est en place (et commets le même acte). Cependant, lorsqu’il est dans cet état et commet une erreur, il tombe sous la protection d’Allah : « ô notre Seigneur, ne nous punit pas pour des fautes commises par oubli ou par erreur (2 ; 286), Il n’y pas de blâme sur vous si vous commettez une erreur de manière involontaire. » » Ibn Taymiyya, Majmou‘a al-fatawa al-koubra

Ibn Taymiyya mentionne quelques grands Cheikhs du Soufisme dans le volume intitulé icIlm as-Suluk, (“la Science de Voyager dans la Voie de Dieu “), qui consistue, en intégralité, les 775 pages du volume 10 de MajmaicUn Al-Fatawa, il dit (p. 516) : « Les grands Cheikhs Soufis sont bien connus et acceptés, tels que Bayazid Al-Bistami, Cheikh Abdoul Qadir Jilani, Junaid ibn Mohammad, Hasan Foudayl Al-Basri, Al-ibn Al-Ayyad, Ibrahim ibn Al-Adham, Abi Souleyman ad-Darani, Ma’rouf Al-Karkhi, Sari as-Saqati, Cheikh Hammad, Cheikh Aboul Bayan».

Dans son commentaire, Ibn Taymiyya met l’accent sur le fait que la primauté de la Chari‘a est la tradition de base dans le Tassawwouf, et pour supporter ce point, il donne une liste de plus d’une douzaine des premiers maîtres, aussi bien que des cheikh contemporains de son temps dont ceux de son école Hanbali, al-Ansari al-Harawi et ‘Abd al-Qadir DJilani, et le cheikh de ce dernier, Hammad Al-Dabbas :

« Les élites parmi les pratiquants de cette Voie – comme la majorité des premiers cheikh (chouyoukh al-salaf) dont Foudayl ibn ‘Iyad, Ibrahim ibn Adham, Ma‘rouf al-Karkhi, al-Sari al-Saqati, al-Jounayd ibn Mohammad, et autres de la première génération des maîtres, aussi bien que Cheikh ‘Abd al-Qadir, Cheikh Hammad, Cheikh Abou al-Bayan et autres maîtres qui sont apparus plus tard – n’ont pas permis aux pratiquants de la voie Soufie de se démarquer des interdits et ordres de la législation divine, même si cette personne a volé dans les airs ou a marché sur l’eau »

Quelque part encore, dans son al-rissala al-safadiyya, Ibn Taymiyya défend les Soufis comme ceux qui appartiennent à la voie de la Sunna et la représentent dans leurs enseignements et écrits :

« Les grands cheikh mentionnés par Abou ‘Abd al-Rahman al-Soulami dans Tabaqat al-soufiyya, et Abou al-Qassim al-Qouchayri dans al-Rissala, étaient adhérents de l’école d’Ahl al-Sunna wa al-Jama‘a et de l’école d’Ahl al-hadith, comme al-Foudayl ibn ‘Iyad, al-Jounayd ibn Mohammad, Sahl ibn ‘Abd Allah al-Toustari, ‘Amr ibn‘Othman al-Makki, Abou ‘Abd Allah Mohammad ibn Khafi al-Chirazi, et autres; et leurs discours étaient fondés sur la Sunna, et ils rédigèrent des livres au sujet de la Sunna ».

La réponse d’Ibn Taymiyya est d’appliquer le concept légal d’ijtihad à la voie spirituelle, spécifiquement à la notion d’ilham ou inspiration. Dans ses efforts d’unir sa volonté avec celle d’Allah, le vrai Soufi atteint un état où il ne désire rien d’autre que de découvrir la plus belle oeuvre, l’action la plus plaisante et la plus aimée d’Allah. Lorsque les données légales extérieures ne peuvent plus le diriger dans ces matières, il peut compter sur les notions d’inspiration (ilham) et de perception intuitive (dhawq) du Soufi :

« Si le disciple a employé ses efforts aux indications externes de la Chari’a et n’a pas vu la meilleure probabilité concernant une action, il peut être alors inspiré à cause de sa bonne intention combinée à sa peur d’Allah, il peut choisir parmi deux actions laquelle est supérieure à l’autre. Ce genre d’inspiration (ilham) est une indication concernant la vérité. Elle peut même être une forte indication par rapport à une faible analogie, des hadiths faibles, des arguments littéraires faibles (zawahir), et une faible présomption de continuité (istichab) qui sont employés par plusieurs qui fouillent dans les principes, les différences et du fiqh systématisé. Faire appel à ilham et dhawq n’est pas synonyme de suivre ses propres caprices ou ses préférences personnelles ».

Dans sa lettre à Nasr al-Manbiji, il qualifie cette intuition de « foi informée » (al-dhawq alimani). D’autres travaux qui nous viennent de lui abondent d’éloges pour les enseignements Soufis. Par exemple, dans son livre al-ihtijaj bi al-qadar, il défend l’accent mis sur l’amour d’Allah par les Soufis et leur volontarisme plutôt que l’approche intellectuelle de la religion comme étant en accord avec les enseignements du Coran, le hadith solide et l’Ijma ‘ Salaf :

« En ce qui concerne les Soufis, ils affirment l’amour (d’Allah), et ceci est plus évident chez eux que parmi les autres. La base de leur voie est simplement la volonté et l’amour. L’affirmation de l’amour d’Allah est bien connue dans le langage de leurs premiers et de leurs maîtres récents, comme cela est affirmé dans le Livre et la Sunna et dans le consensus des Salaf ».

Ibn Taymiyya continue :

« Le Tassawwouf a des réalités (haqa‘iq) et des états d’expériences (ahwal) que les Soufis mentionnent dans leur science…Certains disent que le Soufi est celui qui se purifie de tout ce qui le distrait du souvenir d’Allah et qui devient plein de l’image de l’au-delà à tel point que la valeur de l’or et des pierres sera la même pour lui. D’autres disent que le Tassawwouf est de sauvegarder les sens précieux et de renoncer à la prétention à la célébrité et à la vanité etc. Ainsi, le sens de soufifait allusion au sens de Siddiq ou celui qui a atteint le niveau complet de véridique, car les meilleurs des êtres humains après les Prophètes sont les siddiqin, comme Allah le mentionna dans le verset suivant : « Quiconque obéit à Allah et au Messager, ceux-là seront avec ceux qu’Allah a comblés de Ses bienfaits : les prophètes, les saints véridiques, les martyrs, et les vertueux ; Ah, quels bons compagnons que ceux-là ! (4 ; 69) » ».

Nous arrivons maintenant à l’évidence de l’affiliation d’Ibn Taymiyya à la Voie Soufie Qadiri et à sa propre affirmation, comme cela fut rapporté par son disciple Ibn ‘Abd al-Hadi (d.909 H), qu’il reçut le khirqa Qadiri ou manteau d’autorité d’‘Abd al-Qadir al-Jilani à travers une chaîne de trois Cheikh. Il n’y a personne d’autre que les trois Ibn Qoudama qui sont parmi les autorités établies dans le fiqh de l’école Hanbali. Cette information fut publiée par George Makdisi dans une série d’articles dans les années 1970.

Dans un manuscrit de Youssouf ibn ‘Abd al-Hadi al-Hanbali intitulé Bad’al-‘ilqa bi labs al-khirqa (Le début de la protection dans le port du manteau Soufi), Ibn Taymiyya est cité dans une généalogie spirituelle Soufie avec d’autres savants Hanbali bien connus. Les liens dans cette généalogie sont les suivants par ordre descendant :

1. ‘Abd al-Qadir al-Jilani (d.561H)

2. a- Abou ‘Omar ibn Qoudama (d.607H)

2. b- Mouwaffaq al-Din ibn Qoudama (d.620H)

3. Ibn Abi ‘Oumar ibn Qoudama (d.682H)

4. Ibn Taymiyya (d.728H)

5. Ibn Qayyim al-Jawziyya (d.751H)

6. Ibn Rajab (d.795H)

(Abou ‘Omar ibn Qoudama et son frère Mouwaffaq al-Din reçurent directement le khirqa d’‘Abd al-Qadir lui-même.)

Ibn Taymiyya est ensuite cité par Ibn Abd al-Hadi comme affirmant son affiliation Soufie à la fois à l’ordre Qadiri et à d’autres ordres :

« J’ai porté le manteau Soufi d’un certain nombre de cheikh appartenant à diverses tariqa (labistou khirqata at-tassawwouf min tourouqi jamatin min al-chouyoukhi), parmi lesquels le Cheikh Abd al-Qadir al-Jilani, dont la tariqa est la plus grande des tariqa bien connues ».

Plus loin, il dit :

« La plus grande Voie Soufie (ajallou al-tourouq) est celle de mon maître (sidi) ‘Abd al-Qadir al-Jilani, qu’Allah répande Sa miséricorde sur lui ».

(Ibn Abd al-Hadi, Bad’ al-‘ilqa bi labs al-khirqa, ms.al-hadi, Collection Arabe de la Bibliothèque de Princeton et l’université de Damas, copie originale du manuscrit arabe, 985H.)

D’autres confirmations viennent d’Ibn Taymiyya lui-même dans l’une de ses oeuvres al-Masala at-briziyya : « labistou al-khirqa al-moubarakata li al-cheick ‘Abd al-Qadir wa bayni wa baynahou ithnaïn. » « Je portai le manteau Soufi béni d’‘Abd al-Qadir, il y a entre lui et moi deux cheikh ». (Manuscrit de Damas)

– Shamsedine Mohammad Ibn Othman connu sous le nom de Dhahabi (d.748H)

Il a suivi l’enseignement d’illustres savants du Cham (grande Syrie), d’égypte et du Hijaz. Il a visité plusieurs villes et centres islamiques, il a reçu un enseignement diversifié, étudiant plusieurs branches des sciences religieuses, et plus spécialement les lectures coraniques et le hadith. On l’a cité comme modèle pour sa capacité de mémorisation, le surnommant : « L’imam de l’existence en matière de mémorisation ». Il est une référence sûre et incontournable pour tous les maîtres du Hadith.

Il est étrange que Dhahabi soit cité pour illustrer des points de vue anti-Soufi alors qu’il dit explicitement au sujet de l’un des Soufis qui fut le plus attaqué, Ibn Al-Farid : « Ne vous empressez pas à le juger ». Ici est la remarque de Dhahabi sur Ibn al-Farid dans Mizan al-i‘tidal :

« Il rapporta des hadiths de al-Qassim ibn ‘Assair; il parla haut d’une union franche avec Allah dans sa poésie, et ceci est une grande calamité : par conséquent, examinez précieusement ses compositions et ne vous empressez pas de juger, au contraire, ayez la meilleure opinion des Soufis (hassin al-dhanna bi al-soufiyya) ».

Les Soufis parmi les maîtres de hadith de Dhahabi sont trop nombreux pour être cités. Ci-dessous, nous rapportons quelques noms comme cela est énuméré par Dhahabi lui-même dans son Mou‘jam shouyoukh al-Dhahabi ou « l’abrégé des Cheikh (de hadiths) de Dhahabi » :

« – Ahmad ibn Abou al-Ma‘ali al-Abarqouhi (d.701H), qui dit au cours de sa dernière maladie lorsqu’il était à La Mecque : « Je mourrai de cette maladie parce que le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) m’a promis que je mourrais à la Mecque ».

– Ahmad ibn Mohammad Najm al-Din Abou al-‘Abbas ibn Sasra (d.723H), le chef juge Chafi‘i (qadi al-qoudat) et le chef des enseignants religieux (Cheikh al-chouyouck) à Damas. Il désapprouva Ibn Taymiyya et présida à son jugement à Damas en 705H.

– « Mon ami » Charaf al-Din Ahmad ibn Nasr Allah al-Faqih al-Soufi (d.730H), de la Khaniqa al-Tawawis.

– Le leader et Cheikh Sadr al-Din Abou al-Majami ‘ Ibrahim ibn Mohammad al-Jouwayni al-Khourassani al-Soufi al-Mouhaddith (d.720H). Dhahabi rapporta que le gouverneur Mongol Ghazan Khan accepta de devenir Musulman par lui. Il ajouta : « Il était extrêmement respecté par les Soufis à cause du niveau spirituel de son père Sa‘d al-Din ibn Hammouwayh (ou Hamawayh). » Sa‘d al-Din (d.678H) fut Cheikh al-chouyoukh à Damas.

– Oum Mohammad Zaynab bint ‘Ali al-Wassiti (d.695H). « Une femme versée dans la servitude, dans le jeûne, forte, humble, honorable. Son frère l’Imam Taqi al-Din ibn al-Wassiti avait l’habitude de la visiter pour bénéficier de sa bénédiction (yaqsoud ziyarataha wa al-tabarrouk biha) ».

– Abou al-Barakat Cha‘ban ibn Abi Bakr al-Irbili al-Soufi al-Qadiri al-Zahiri al-Zahid (d.711H). « Il était un homme de bonté, de clairvoyance, modeste, raffiné, qui n’a ni lu ni écrit ».

– Charaf al-Din ‘Abou Mohammad Abd Allah ibn ‘Abd al-Halim ibn Taymiyya al-Harrani al-Hanbali (d.727H). « Frugale dans son manger et dans son habillement, doté de plusieurs qualités, il avait l’habitude de faire des reproches à son frère sur certaines choses (Taqi al-Din Ibn Taymiyya) qu’il considéra blâmables de sa part ».

– « L’Unique Leader, le Connaisseur et Savant de Hadith », Abou ‘Abd Allah Najm al-Din ‘Ali ibn Mohammad al-Azli al-Hilali al-Dimaschqi al-Chafi‘i (d.729H). « Il avait l’habitude de raconter des récits bénéfiques, et il garda une excellente estime pour les saints – qu’Allah le compte ainsi que moi parmi eux ».

– Oum Mohammad ‘Aïcha Bint Rizq Allah al-Biladiyya al-Maqdissiyya (d.711H). « Elle était l’une des femmes dévotes qui pleurait beaucoup, exhibait l’humilité, et tenait fermement à la récitation des dévotions (awrad). »

– « L’Imam, le Juge, l’Exégète, le Savant, l’Ascétique » Jamal al-Din Mohammad ibn Soulayman al-Naqih al-Balkhi al-Dimaschqi al-Hanafi (d.698H). « Il compila un très long commentaire du Coran en quatre-vingt-dix-neuf volumes dans lesquels il figura les lectures coraniques, les contextes de la révélation, les explications linguistiques, les dires des exégètes, ceux des Soufis, et leurs haqa‘iq (réalités spirituelles) ».

– « Le brillant savant et le spécialiste du Oussoul » Safi al-Din Mohammad ibn ‘Abd al-Rahim al-Hindi al-Chafi‘i (d.715H). « Il était versé en prière, en adoration, en Tassawwouf et d’une excellente croyance ». Il témoigna contre Ibn Taymiyya au jugement de ce dernier à Damas ».

– « L’Imam, le Réciteur, le scrupuleux, le Résidu des Salaf » Mouwaffaq al-Din Abou ‘Abd Allah Mohammad ibn Abi al-‘Ala’ al-Rabbani al-Nassibi al-Chafi‘i al-Soufi (d.695H). « Le Cheikh des Soufis et des fouqara’ à Ba‘albak. » etc. (Fin de l’extrait)

– Taj al-Din al-Soubki (d.771H)

Cheikh al-Islam Taj al-Din al-Soubki, le fils de Cheikh al-Islam, al-Hafidh Taqi al-Din al-Soubki (d.756H) qui fut un disciple d’Ibn ‘Ata ‘ Allah, mentionna dans son livre Mou‘id al-ni‘am sous le chapitre intitulé Soufisme :

« Qu’Allah les (les Soufis) salue et leur donne vie, et qu’Il nous place avec eux au paradis. Trop de choses ont été dites à leur sujet et trop de gens ignorants ont dit des choses qui ne les concernent pas… La vérité est que ces gens ont laissé ce monde et sont affairés avec l’adoration ».

Cheikh Abou Mohammad al-Jouwayni (le père de l’Imam al-Haramayn) dit :

« Ils sont parmi les gens d’Allah et de Son élite. Sa miséricorde est obtenue à travers leur souvenir d’Allah, et la pluie descend avec leurs invocations. Qu’Allah soit satisfait d’eux et qu’Allah soit satisfait de nous à cause d’eux ».

– Imam Abou Ishaq al-Chatibi al-Maliki(d.790H)

L’un des savants fondamentaux d’Oussoul al-fiqh ou la méthodologie de loi dont les livres comme ceux d’al-Ghazali, sont requis dans ce champ, il a mis un grand accent sur l’exigence de la complète connaissance et l’érudition de la Langue Arabe, et non seulement la compréhension correcte pour ceux qui pratiquent l’ijtihad.

Il écrit dans son livre Al-I‘tissam :

« Plusieurs des ignorants pensent que les Soufis sont détendus dans la Chari‘a. Loin d’eux de telles fausses croyances qui leur sont attribuées ! La première fondation de leur voie est la Sunna et d’éviter tout ce qui s’y oppose ! Leur élite porte-parole et maître de leurs voies et le pilier de leur groupe, Abou al-Qassim al-Qouchayri, déclara qu’ils acquièrent le nom de Tassawwouf en vue de se dissocier des Gens d’Innovation.

Il mentionna que les Musulmans les plus honorables, après le Prophète, ne se donnèrent pas, en leur temps, d’autre titre que Compagnons, car il n’y a pas de mérite au-dessus de celui d’être un Compagnon – ainsi ceux qui leur succédèrent furent appelés Successeurs.

Après cela, les gens différèrent et la disparité des niveaux devint plus apparente parmi eux. Les élites parmi ceux dont la prudence dans la croyance fut observée comme intense furent ainsi appelées zouhhad et ‘oubbad.

En conséquence, toutes sortes d’innovations firent leur apparition, et les élites d’Ahl al-Sunna qui observèrent leurs obligations envers Allah, et préservèrent leur coeur de l’insouciance devinrent uniques en leur genre sous le nom de Tassawwouf. Considère ceci, et tu réussiras. Et Allah est Savant ».

– Imam al-Sakhawi (d.902H)

Le disciple le plus en vue d’Ibn Hajar al-‘Asqalani et un grand juriste, historien, et un maître de hadith, Shams al-Din Mohammad ibn ‘Abd al-Rahman al-Sakhawi, comme Taqi al-Din al-Soubki et al-Souyouti, appartenaient à l’ordre Chadhili fondé par Abou al-Hassan al-Chadhili, et représenté par le grand Maître Maliki Ibn ‘Ata ‘ Allah dont cinq des travaux furent transmis par al-Sakhawi aux futures générations, y compris le Hikam du commentateur Chadhili Ahmad Zarrouq (d.899H).

Dans sa biographie, intitulée al-Daw ‘ al-lami, des gens fameux de son époque, dont al-Sakhawi, révèle que son père Zayn al-Din ‘Abd al-Rahman ibn Mohammad (d.874H) était un Soufi né au Caire d’une grande piété et un membre de la communauté Soufie Baybarsiyya où Ibn Hajar, le professeur de Sakhawi, enseigna pendant quarante années.

Dans la section de son al-Jawahir al-moukallala fi al-akhbar al-moussalsala consacrée à la transmission de hadiths à travers des chaînes exclusivement de narrateurs Soufis, Sakhawi déclare qu’il a reçu lui-même la voie Soufie de Zayn al-Din Ridwan al-Mouqri ‘ au Caire. Dans la même oeuvre, Sakhawi mentionne aussi plusieurs de ses maîtres et disciples de hadiths qui furent Soufis.

– Cheikh al-Islam al-Souyouti (d. 911H)

Le Raviveur du huitième siècle islamique et l’Imam Moujtahid dit, dans son livre sur le Tassawwouf intitulé Ta’yid al-haqiqa al-‘aliyya wa-tachyid al-tariqa Al chadhiliyya (Le maintien de la haute vérité et le soutien de la voie Chadhili) :

« Le Tassawwouf en lui-même est une honorable connaissance. Il explique comment suivre la Sunna du Prophète et éviter l’innovation, comment purifier l’ego…et se soumettre réellement à Allah…J’ai observé les problèmes au sujet desquels les Imams de la Chari‘a ont critiqué les Soufis, et je n’ai pas vu un seul vrai Soufi coupable de telles critiques. Au contraire, ces propos sont tenus par les gens d’innovation et les extrémistes qui se sont revendiqués les titres de Soufis alors qu’en réalité ils ne le sont pas…Poursuivre la science des coeurs, la connaissance de ses maladies dont la jalousie, l’arrogance, la fierté, et les abandonner est une obligation qui incombe à tout musulman ».

– Ibn Hajar al-Haythami (d.974H)

Cheikh al-Islam Ibn Hajar al-Haytami était un élève de Zakariyya al-Ansari. Comme déjà mentionné, il représente la plus importante ressource de jugement légal (fatwa) dans la dernière école Chafi‘i. Il fut, une fois, questionné au sujet des statuts légaux de ceux qui critiquent les Soufis. Y a-t-il une raison pour de telles critiques ? Il répondit dans son Fatawa hadithiyya :

« Il est obligatoire, pour toute personne dotée d’esprit et de foi, de ne pas tomber dans le piège de critiquer ce groupe (les Soufis), car c’est un poison mortel, comme cela a été attesté dans le passé et récemment ».

Parmi plusieurs autres écrits sur le même sujet, il donna une importante fatwa disant : « Quiconque nie, rejette, ou désapprouve les Soufis, Allah ne lui rendra pas sa connaissance bénéfique ».

Voici ci-dessous le texte complet de cette Fatwa :

« Notre Cheikh, le savant gnostique (‘arif) Abou al-Hassa al-Bakri (d.952H) me dit, sur l’autorité du cheikh et savant Jamal al-Din al-Sabi mot pour mot – et il est l’un des étudiants les plus distingués de notre Cheikh Zakariyya al-Sabiq (al-Ansari), qu’al-Sabi avait l’habitude de critiquer la voie de l’honorable Ibn al-Farid.

Une fois, al-Sabi vit en rêve le Jour du Jugement et il transportait un fardeau qui l’épuisa. Ainsi, il entendit quelqu’un dire : « Où est le groupe d’Ibn Al-Farid? » Il dit : « J’avançai dans l’espoir d’entrer avec eux, mais on me dit : « Tu n’es pas l’un d’eux, retourne » Lorsque je me réveillais, j’eus extrêmement peur, et je ressentis du regret et du chagrin, alors je me repentis à Allah d’avoir rejeté la voie d’Ibn al-Farid, et je renouvelais mon engagement à Allah, puis je retournais en la croyance qu’il (Ibn al-Farid) est l’un des awliya – saints et amis – d’Allah. L’année suivante et au cours de la même nuit, je fis le même rêve. J’entendis dire : « Où est le groupe d’Ibn Al-Farid ? Laissez-les entrer au paradis » Alors, je m’avançai avec eux et il fut dit : « Entre, car tu es maintenant l’un d’eux » ».

Examine cette affaire très attentivement parce qu’elle vient d’un homme de savoir de l’Islam. Il apparaît – et Allah est Savant – que c’est à cause de la baraka ou la bénédiction de son cheikh Zakariyya al-Ansari qu’il a vu le rêve qui lui a fait changer d’avis. Autrement, combien de leurs opposants ont été laissés dans leur aveuglement, jusqu’à ce qu’ils se trouvent en perdition et en destruction ! »

Voici le récit suivant de la première rencontre de Djilani (qu’Allah l’agrée) avec al-Hamadani (qu’Allah l’agrée) et rapporté par Haythami dans son Fatawa hadithiyya :

« Abou Sa‘id ‘Abd Allah ibn Abi ‘Asroun (d.585H), l’Imam de l’école Chafi‘i, dit :

« Lorsque je commençais à chercher la connaissance religieuse, je restais en compagnie de mon ami Ibn al-Saqa qui était un élève de l’école Nizamiyya, et il était de notre habitude de rendre visite aux pieux. Nous avons appris qu’il y avait à Bagdad un homme du nom de Youssouf al-Hamadani qui était connu comme al-Ghawth, et qu’il était capable d’apparaître et de disparaître toutes les fois qu’il le voulait. Ainsi, je décidais de lui rendre visite avec Ibn al-Saqa et Cheikh ‘Abd al-Qadir al-Djilani, qui était jeune en ce temps-là. Ibn al-Saqa dit, « Lorsque nous visiterons Youssouf al-Hamadani, je lui poserai une question dont il ne connaîtra pas la réponse ». Je dis : « Je vais lui poser aussi une question et je veux voir ce qu’il va dire. » Cheikh ‘Abd al-Qadir Djilani dit : « ô Allah, épargne-moi de questionner un saint comme Youssouf al-Hamadani, mais j’irai en sa présence pour solliciter sa baraka – bénédiction – et sa connaissance divine ».

« Nous entrions dans son cercle d’étude. Il se rendit invisible et nous n’arrivions pas à le voir pendant un certain temps. Il regarda sévèrement Ibn al-Saqa et dit : « ô Ibn al-Saqa, comment oses-tu me poser une question alors que ton intention est de me confondre ? Ta question est celle-ci et ta réponse est celle-là ! » Ensuite il dit : « Je vois le feu de la mécréance brûler dans ton coeur. » Il me regarda et dit, « ô ‘Abd Allah, es-tu en train de me poser une question et attendre ma réponse ? Ta question est celle-ci et ta réponse celle-là. Les gens sont mécontents de toi parce que leur attention est distraite par ton manque de respect à mon égard ». Ensuite il regarda Cheick ‘Abd al-Qadir al-Jilani, le fit asseoir près de lui et l’honora. Il dit : « ô ‘Abd al-Qadir, tu as satisfait Allah et Son Prophète par ton respect pour moi. Je te vois assis dans le futur à la plus haute place à Bagdad, prêchant, enseignant aux gens et leur disant que tes pieds sont sur le cou de chaque wali ! Et, je vois, chaque wali de ton temps te donner la préséance à cause de ton rang et ton honneur ».

Ibn Abi ‘Asroun continue, « La renommée d’Abd al-Qadir devint très populaire et tout ce que Cheick al-Hamadani avait dit à son sujet arriva. Il fut un temps où il dit, « Mes pieds sont sur le cou de tous les awliya » et il fut une référence et un flambeau en son temps, illuminant les gens jusqu’à leur destination.

Le sort d’Ibn al-Saqah fut autre chose. Il était brillant dans sa connaissance de la loi divine. Il devançait tous les savants de son temps. Il avait l’habitude de débattre avec les savants de son temps et les vaincre, jusqu’à ce que le calife l’admette dans son cercle. Un jour, le calife l’envoya comme émissaire chez le Roi de Byzance, qui à son tour fit appel à tous ses prêtres et savants de la religion chrétienne pour débattre avec lui. Ibn al-Saqa les vainc tous. Ils furent incapables de donner des réponses en sa présence. Il leur donna des réponses qui les rendirent comme des enfants et de simples élèves en sa présence.

Sa brillance fascina tellement le Roi de Byzance qu’il l’invita à une rencontre privée avec la famille royale. à cette rencontre, il vit la fille du Roi. Il tomba immédiatement amoureux d’elle, et il demanda au Roi la permission de l’épouser. Elle refusa à moins qu’il accepte sa religion. Il accepta, abandonnant ainsi l’Islam et acceptant la religion chrétienne de la princesse. Après son mariage, il tomba sérieusement malade. Ils le chassèrent du palais. Il devint un mendiant dans la ville, quémandant de la nourriture, mais personne ne lui en fournissait. L’obscurantisme s’abattit sur son visage.

Un jour, il vit quelqu’un qu’il connaissait. Cette personne rapporte : « je lui demandais, que t’est-il arrivé ? » Il répondit : « Il y avait une tentation et j’y suis tombé. » L’homme lui demanda : « Te souviens-tu de quelque chose du Coran ? » Il répondit : « Je me souviens seulement de roubbana yawaddu al-ladhina kafarou law kanou muslimin… « Encore ceux qui mécroient voudraient avoir été Musulmans » (15:2).

Il tremblait comme s’il allait rendre son dernier souffle. Je le tournai en direction de la Ka‘ba, mais il ne faisait que se tourner en direction de l’est. Encore, je le tournai en direction de la Ka‘ba, mais il tourna en direction de l’Est. Je le tournai pour une troisième fois en direction de la Ka‘ba, mais il se retourna en direction de l’Est. Comme son âme alors le quittait, il dit : « ô Allah ; ceci est le résultat de mon manque de respect à Ton saint, Youssouf Al-Hamadani ».

Ibn Abi ‘Asroun continue : « Je partis à Damas et le Roi là-bas, Nour al-Din al-Chahid, m’offrit le contrôle du département des affaires religieuses que j’acceptais. En conséquence, la dunya entra de tous les côtés : provisions, subsistance, l’honneur, l’argent, et une position pour le reste de ma vie. Ceci est ce que le Ghawth Youssouf al-Hamadani avait prédit pour moi ».

Nous vous rappelons le conseil d’al-Dhahabi dans sa note biographique sur Ibn al-Farid dans Mizan al-i‘tidal : « Ne vous empressez pas à juger, au contraire, retenez la meilleure opinion des Soufis » et le conseil de l’Imam Ghazzali dans al-Mounqidh min al-dalal : « Ayez de bonnes pensées (au sujet des Soufis) et ne nourrissez pas de doute dans votre coeur » et la fatwa d’Ibn Hajar al-Haythami concernant les critiques de ceux qui respectent le tassawwouf et croient aux awliya : « Des mauvaises pensées à leur sujet (Les Soufis) signifient la mort du coeur. »

– ‘Abd al-Wahhab al-Cha‘rani al-Hanafi (d.973H)

Un savant Hanafi de fiqh comparatif et auteur de plusieurs oeuvres sur la Loi et le Tassawwouf, dont al-Tabaqat al-koubra dans lequel il écrit, comme cité dans ‘Oumdat Al-Salik :

« La voie des Soufis est basée sur le Coran et la Sunna et elle est basée sur la vie en conformité avec la morale des Prophètes et des Purifiés. Elle ne doit pas être blâmée à moins qu’elle viole une déclaration explicite du Coran, de la Sunna ou du consensus des savants. Si elle ne contredit pas l’une de ces sources, le plus que l’on peut dire est qu’elle est une compréhension qui a été offerte au Musulman, alors laissez quiconque souhaite, s’y embarquer et quiconque ne veut pas, s’en abstenir, cela étant vrai autant pour les travaux comme pour la compréhension. Ainsi, aucun prétexte n’existe pour la condamner sauf pour quelqu’un qui a une mauvaise opinion des autres ou interprète comme ostentation ce qu’ils font, ce qui est interdit.

Quiconque examine minutieusement les branches de la connaissance des Gens d’Allah Le Très Haut, trouvera qu’aucun d’eux ne va au-delà de la Loi Sacrée. Comment peuvent-ils aller au-delà de la Loi Sacrée alors que c’est la loi qui relie les Soufis à Allah à tout moment !? Au contraire, la raison des doutes de quelqu’un qui n’est pas familier avec la voie des Soufis, qui est l’essence même de la Loi Sacrée, est que cette personne n’a pas profondément maîtrisé la connaissance de la Loi. Voilà pourquoi Jounayd (qu’Allah Le Très-Haut lui fasse miséricorde) dit : « Cette connaissance qui est la nôtre est basée sur le Coran et la Sunna, » en réponse à ses contemporains et autres qui imaginent qu’elle est en dehors des limites du Coran et de la Sunna ».

– Cheikh al-Islam Zakariyya Ansari (d. 926H)

Il fut connu comme le Cheikh des Cheikh. Il était un maître de hadith, un juge et un exégète du Coran. Il était le professeur de Cheikh al-Islam Ibn Hajar al-Haythami et fut auteur de plusieurs livres sur le Tassawwouf, il a dit :

« Le soufiyya ou les Soufis sont ainsi appelés à cause de la Vérité à laquelle – Allah – les a rendus purs (safahoum) et les a favorisés sans réserve (akhlassa lahoum al-ni‘am) à travers ce qu’Il leur a permis de regarder au-dessus ».

– Moulla ‘Ali al-Qari (d.1014H)

L’un des grands maîtres Hanafi de hadith et des Imams de fiqh, de commentaires du Coran, de langage, d’histoire de Tassawwouf, il fut l’auteur de plusieurs grands commentaires dont al-Mirqat sur Michkat al-massabih en plusieurs volumes, une série de deux volumes de commentaires sur al-Chifa’ de Qadi ‘Iyad, et deux volumes de commentaires sur la version abrégée du Ihya de Ghazzali intitulé ‘Ayn al-‘ilm wa zayn al-hilm (La fontaine de connaissance et la décoration de la compréhension). Son livre d’invocations prophétiques, al-Hizb al-a‘zam (Le suprême dhikr journalier) forme la base du célèbre manuel de dhikr de l’Imam al-Jazouli, Dala’il al-khayrat, qui, avec le Coran, sont récités quotidiennement par les pieux Musulmans à travers le monde entier.

Il écrivit dans l’avant-propos de son commentaire sur Ghazzali :

« J’écrivis ce commentaire sur la version de l’abrégée du Ihya’ ‘ouloum al-din de la Preuve de l’Islam et la Confirmation des Créatures espérant recevoir quelques miséricordes émanant des mots des plus purs connaisseurs d’Allah, et de bénéficier des dons qui se dégagent des pages des Cheikh et des Saints, afin que je puisse être compté parmi eux et être élevé dans leur assemblée, même si je suis petit dans leur poursuite et leur service, car je compte sur mon amour pour eux et je me contente de mon grand désir pour eux ».

– Cheikh Muhammad ‘Abduh

La revue Al Mouslim a publié un article intitulé “L’avis de Sheikh Muhammad ‘Abduh sur le soufisme”, rapporté par Sheikh ‘Alî Mahfûdh – qu’Allah lui fasse miséricorde – dans son épître de l’ingéniosité où il dit : « Cheikh Muhammad Abduh, qu’Allah lui fasse miséricorde – dit :

« Certains chercheurs en histoire musulmane, parmi ceux qui se sont intéressés aux innovations et aux coutumes qui sont apparues dans cette histoire, défigurant ainsi sa beauté, se sont fourvoyés sur la raison de la chute des musulmans dans l’ignorance. Ils ont opiné, en effet, que de toutes les raisons qui ont conduit les musulmans à l’ignorance de leur religion et à leur éloignement du monothéisme pur qui est la voie du salut, le Tassawwouf jouait un rôle prépondérant. Mais il n’en est rien. à ce titre, citons brièvement la finalité du soufisme et ce qu’il est devenu.

Le Tassawwouf fit son apparition au cours des premiers siècles de l’islam et jouissait d’une grande notoriété. Il visait initialement à rectifier les comportements, à éduquer les esprits, à les entraîner aux oeuvres de la religion, à les attirer à celle-ci et à faire d’elle, le souffle qui les anime, tout ceci, en même temps qu’il leur révélerait de manière progressive les sagesses et les secrets qu’elle renferme.

Les juristes, qui s’arrêtaient à l’aspect extérieur des règlements liés aux cultes et aux transactions, dénonçaient la connaissance que les soufis avaient des secrets de la religion et les accusaient d’égarement et d’abjuration. Comme les juristes jouissaient à l’époque d’une grande influence sur le pouvoir et les sultans, les soufis durent cacher leur affaire et codifier une terminologie propre à leur usage et n’acceptaient aucun prétendant qu’après lui avoir posé diverses conditions et l’avoir soumit à de longues épreuves. Ils disaient : « Il est indispensable pour celui qui souhaite notre compagnie d’être un prétendant, ensuite un aspirant, puis un itinérant, et une fois qu’il s’est engagé dans le cheminement, il peut poursuivre jusqu’à la fin ou s’arrêter en chemin ».

Ils éprouvaient donc l’éthique du prétendant et suivaient son évolution à long terme pour s’assurer que sa volonté est authentique et sa détermination sincère et que son objectif n’est pas uniquement de percer leurs secrets. Puis, une fois qu’il gagnait leur confiance, ils l’instruisaient petit à petit ».

Recherche et Traduction par la Zaouiya Tidjaniya El Koubra d’Europe