Question-réponse 23

Pour la récitation de la Djaouharatou-l-kamel, quelle est la différence entre les 11 grains et les 12 grains sachant que Djawahirou-l-Ma’ani mentionne 11 grains ? De plus, un nouveau qui désire s’affilier à la Tariqa que doit-il choisir ? Ou bien les deux sont-ils pareils ?

REPONSE

Concernant les éclaircissements demandés au sujet de la Djaouharatou-l-Kamel et de son nombre exact à effectuer, il faut faire un petit récapitulatif historique.

Il faut savoir avant tout que pendant une époque, du vivant de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), lui et ses compagnons récitaient 11 fois la Djaouharatou-l-Kamel et d’ailleurs c’est encore ce chiffre qui est inscrit dans le livre Djawahirou-l-Ma’ani (car il fut écrit environ 15 ans avant son décès).

Par la suite, cela fut abrogé et remplacé par la récitation de 12 fois du vivant même de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) mais vers la fin de sa vie (m.1815). Ainsi, petit à petit, tous les disciples qui ont été mis au courant du changement le firent 12 fois à la place de 11 fois, mais du fait que les disciples s’étaient répandus dans de nombreux pays, les Mouqadem reçurent la nouvelle de l’abrogation au fur et à mesure.

Concernant le cas des 11 récitations effectuées par certains à notre époque, cela est en relation historique avec Cheikh Ahmed Hamahoullah (qu’Allah l’agrée). Ce personnage est né à Kamba Sagho (Mali) en 1883 d’un père érudit de Tichit en Mauritanie et d’une mère peule du Mali. Il devint un maître de la Tariqa controversé et plusieurs évènements en sont la cause :

– Il fut reconnu par son entourage comme un saint homme et par certains dignitaires de l’époque comme un érudit.

– Il fut connu aussi comme un résistant, face à la colonisation.

– Il fut d’abord affilié à la Tariqa Tidjaniya à travers une chaîne qui remonte à Cheikh Omar Foutiyou Tall (qu’Allah l’agrée), puis il se ré-affilia à travers Sidi Mohamed Ibn Abdallah (mort en 1909) arrivé du Touat algérien et installé à Nioro du Sahel en 1900. Ce Mouqadem, qui selon des sources proches de Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée), aurait été affilié de la main même d’un grand compagnon de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) nommé Sidi Tahar Bouteïba (qu’Allah l’agrée).

Ce Mouqadem donc, lui a transmit la Tariqa avec la récitation de 11 Djaouharatou-l-Kamel à la place de 12 fois tel que Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée) l’avait reçu par sa chaîne Omarienne. Ce même Mouqadem aurait dénoncé la pratique frauduleuse des 12 fois comme étant contraire à l’enseignement de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret).

Cet événement fit naître un grave conflit disproportionné entre les Tidjani de différentes affiliations, conflit qui provoqua des propos indécents et des actes injustes (envers Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée) et ses disciples), que la Tariqa dans sa particularité et l’Islam dans sa généralité renient entièrement. Maintenant, au vu de ces évènements, il existe trois avis différents qui se sont profilés pour la récitation de la Djaouharatou-l-Kamel et nous allons les exposer :

1 – Il existe un avis prônant que la seule récitation véritable de la Djaouharatou-l-Kamel est les 11 récitations (et les 12 fois sont « tolérées »). C’est l’avis très minoritaire de certains Mouqadem zélés de la branche affiliée à Cheikh Hamahoullah.

Ils tirent leur argument du fait que d’une part, c’est ce chiffre qui est inscrit dans Djawahirou-l-Ma’ani, livre référence de la Tariqa écrit par le célèbre khalife Sidi Hajj Ali Harazim (qu’Allah l’agrée), et d’autre part en exposant la préséance ésotérique de la valeur mystique du chiffre 11.

Donc, pour eux, il n’y a pas eu d’abrogation de la part de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) lui-même. Le rajout du 12ième grain serait l’acte gratuit de certains de ses compagnons et Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) aurait toléré cet acte, mais sans y adhérer pleinement lui-même.

Nous nous sommes permis de dire des « Mouqadem zélés », car afin de faire triompher leurs causes, ils n’hésitent pas à faire des remaniements historiques sans aucun fondement dans le seul désir de paraître plus éclairés et mieux guidés. On peut lire, par exemple, dans le livre d’Alioune Traoré « Cheikh Hamahoullah, homme de foi et résistant », une claire démonstration pour faire paraître les adeptes des 12 fois comme passifs et complaisants à l’égard de la présence coloniale.

Cela impliquait les plus grands dignitaires de la Tariqa, à savoir, Sidi Mohamed El Habib fils de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), installé à ‘Aïn Madhi, et Sidi Hajj Ali, khalife officiel de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), installé à Tamacine, allant jusqu’à inventer un exil fictif vers Fès du fils de Seïdina avec date à l’appui. Et à l’opposé, les partisans des 11 fois font office de héros résistants face aux colonisateurs.

En fait, cet avis est non seulement non recevable, mais surtout condamnable, car cet argument ne se base sur aucun fait avéré authentique. La seule référence était une soi-disant « tradition orale » qui n’a jamais été mentionnée par aucun compagnon de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), et par aucun savant de la Tariqa qui les avait à leur tour côtoyés.

Est-il nécessaire de rappeler que les récits farfelus et sans fondements abondent malheureusement dans la Tariqa, et de même concernant les faux écrits qui contiennent même des propos jamais tenus par Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui portent préjudice à sa dignité et à celle de la Tariqa ? Les savants de la Tariqa ont suffisamment mis en garde contre le fait de s’y fier et surtout de les colporter.

Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a répondu « oui » lorsqu’on lui a demandé si on mentirait à son sujet et il a alors donné une règle d’or qui est : « Lorsqu’on vous rapporte des propos qui me sont attribués alors pesez-les à la balance de la Chari’a, s’ils sont conformes prenez-les sinon rejetez-les ».

Dans Ifadat-l-Ahmediya Cheikh Mohamed El Hafidh Misri Tidjani a commenté :

« Cela signifie donc que la seule compréhension des propos qui lui sont attribués et qu’il faut retenir est celle qui suit la Sunna, car toute compréhension n’allant pas dans ce sens n’est pas la signification voulue, cela s’il est établi qu’il s’agit véritablement de ses propos, si ce n’est pas établi comme provenant de lui, il faut alors les délaisser entièrement ».

De même, dans la Tariqa il est un devoir de faire référence aux dires authentiques de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), de ses compagnons et des savants de la Tariqa après eux, pour se faire un avis vrai.

En fait, les tenants de cette information désirent à n’importe quel prix faire valoir leur avis et malgré toutes les preuves contraires authentiques que l’on pourrait leur signaler, ils n’en tiendraient point compte, car ce serait comme « déprécier » la valeur de Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée) au profit de ses anciens adversaires de l’époque. Vous constaterez donc qu’on est très loin du caractère neutre et impartial du chercheur de vérité.

De plus, ce n’est point honorer ce Cheikh que d’accorder du crédit à des récits sans fondement qui mettent en cause l’intégrité des compagnons de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et de sa descendance qui se seraient permis de changer volontairement ce que le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) avait confié comme oraisons essentielles inhérentes à la mise en pratique de sa propre Tariqa.

De même, il est inconcevable de penser que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) aurait permis que l’on modifie, sans la permission du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), une seule modalité de ses oraisons particulières sans rien trouver à redire et encore plus, à les laisser faire.

Cela prouve bien leur méconnaissance du respect et de la soumission totale de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) envers son bien-aimé maître, le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Lui qui, par amour envers le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) ne pouvait se taire lorsqu’il constatait l’infraction envers une seule Sunna prophétique, aurait permis que ses disciples changent en sa présence un Ouird particulier confié par le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui-même.

Il est rapporté, dans Ifadat-l-Ahmediya que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) entendit pendant l’assemblée de Dhikr certains disciples altérer la prononciation de la formule « Lê ilêha ila Allah », il s’exclama alors : « Qu’est-ce donc cela ! Qu’est-ce donc cela ! « Lê ilêha ila Allah » ! « Lê ilêha ila Allah » ! ». Il ne s’est pas tu devant une mauvaise prononciation, comment le ferait-il sciemment devant un rajout à l’enseignement prophétique ?! Cela prouve bien aussi, leur méconnaissance de l’éducation de ses compagnons qui étaient auprès de lui comme un mort entre les mains de son laveur.

Concernant le fait que c’est le chiffre 11 qui est inscrit dans Djawahirou-l-Ma’ani, cela est par le fait que ce changement s’opéra plus d’une dizaine d’années après avoir été écrit par Sidi Hajj Ali Harazim (qu’Allah l’agrée). Ce n’est pas le seul changement ou la seule modification qui ont été opérés.

Il en est de même concernant la visite des Saints qui était permise pour ceux qui étaient morts, mais non pas pour les vivants et c’est ce qui est mentionné dans le Djawahirou-l-Ma’ani. Plus tard, cette interdiction sera aussi étendue par Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) aux Saints qui sont morts comme cela est connu par tous les savants de la Tariqa, sous peine d’être rompu d’avec la voie, et sans que cette modification soit pourtant reportée dans ce livre. Il y a d’autres cas similaires, que ce soient des changements pour renforcer ou pour alléger, parfois avec choix et parfois sans choix.

Certes, le livre Djawahirou-l-Ma’ani est une référence pour les adeptes de la Tariqa dans ses sublimes commentaires des versets Qoranique, des hadiths prophétiques, dans l’éclaircissement des sujets troubles rencontrés par les savants et les maîtres. Cependant, il faut tenir compte aussi dans certains domaines, de son historique, de son commentaire et de ses modifications lorsqu’ils ont été effectués.

C’est pour cela qu’il est conseillé par les savants de la Tariqa de lire le Boughiya El Moustafid de Sidi ‘Arbi ibn Sa-ih (qu’Allah l’agrée), car il est un commentaire sûr et précis de ce que contient le Djawahirou-l-Ma’ani, prenant en compte toutes les informations nécessaires qui ont eu lieu après son écriture. Comment agir autrement, sachant que c’est ce qui est demandé pour la bonne compréhension des Paroles d’Allah dans le Qoran et celle du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dans les hadiths. Il est certes demandé à chaque musulman de s’y référer en toute chose, mais le musulman se doit de consulter les savants, car ceux-ci ont appris ce qui est abrogé de ce qui est abrogeant, ce qui a un caractère particulier de ce qui a un caractère général, et toutes les autres subtilités de la science nécessaire pour la juste compréhension.

Quant à la valeur ésotérique du chiffre 11, il faut savoir que la science relative à la teneur ésotérique et mystique des chiffres et des lettres arabes n’a aucun pouvoir de prescription. C’est une science qui sert à affiner des compréhensions, mais non pas à abolir des actes et des faits relatifs à des pratiques confirmées de la part de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), ou de ses compagnons. Donc, cet argument ne peut servir de preuve.

Enfin, pour le cas du mystérieux Mouqadem Sidi Mohamed Ibn Abdallah, originaire de Touat, (même s’il possédait un diplôme général dans la Tariqa lui conférant le droit de nommer autant de Mouqadem qu’il le veut et d’autoriser dans les oraisons essentielles et non essentielles, ce qu’on appelle un Ijaza « Moutlaq el Itlaq »), cela ne lui donne aucun droit de légiférer et d’affirmer que ce sont les 11 récitations qui sont authentiques et les 12 sont une innovation non prescrite, cela outrepasse son rôle de Mouqadem. En effet, n’importe quel Mouqadem, Khalife ou même descendant, dépend entièrement de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et n’a pour rôle que de le représenter, d’être à son service et de suivre son enseignement.

L’Imam Soukeïrij (qu’Allah l’agrée) a dit : « Le Mouqadem dans cette Tariqa Ahmediyya Tidjaniya, quoi qu’il ait atteint dans les degrés particuliers, n’est qu’un représentant de Seïdina, sans posséder une particularité distincte de cela. » (Rafa ’ Niqab).

Et comment en serait-il autrement vu sa station spirituelle unique !? D’ailleurs, parmi les propos que Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a rapportés, il a dit :

« Ma station auprès d’Allah dans l’au-delà est telle que personne d’entre les Aouliya ne peut l’atteindre, et personne ne peut l’approcher que sa valeur soit grande ou petite, et parmi l’ensemble des Aouliya, après l’époque des compagnons jusqu’au jour où on soufflera dans la Trompe, il ne s’en trouve pas un capable d’atteindre notre station […] » (Rimah)

Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) avait demandé une fois au Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), quelle était la cause de tous les mérites et grâces contenus dans cette voie et le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) de lui répondre : « C’est par ta cause ».

Le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui a dit aussi : « Tu es la porte de la réussite pour tout désobéissant qui sera relié à toi ». (Djawahirou-l-Ma’ani)

Comme l’a si bien dit Cheikh Omar Foutiyou (qu’Allah l’agrée) : « Le mérite accordé à ceux qui suivent repose entièrement sur le mérite détenu par celui qui est suivi ». (Rimah)

Donc, seul Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) est habilité à affirmer s’il s’agit là d’une innovation ou non. Nous rappelons que le changement de 11 à 12 fois s’est faîte du vivant de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) environ un an avant son décès. Pendant toute cette période, la Wadhifa s’est effectuée avec la récitation de 12 Djaouharatou-l-Kamel.

Après sa mort, chaque « Cheikh Zaouiya » officiel et Imam qui furent désignés à la Grande Zaouiya de Fès continuèrent à pratiquer exactement ce que Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) avait effectué de son vivant. Jamais les compagnons ne se sont posé la question du pourquoi cela est passé à 12 récitations, car ils se contentaient d’imiter les œuvres de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) tels qu’il les avait accomplies.

2- D’où un autre avis qui prône que la seule récitation valable est 12 fois alors que la récitation 11 fois a été abrogée et donc n’est plus valable. Plusieurs éminents savants de la Tariqa soutiennent cet avis avec en tête de liste le célèbre et réputé maître de la Tariqa, savant de la Qarawiyyine et qui fut l’un des Cheikh et Imam de la Zaouiya el Koubra de Fès, Cheikh Idriss El Iraqi (qu’Allah prolonge sa vie).

Parmi les arguments avancés, il a cité qu’il est en possession d’un diplôme effectué par Sidi Hajj Ali Tamacini (qu’Allah l’agrée), et signé par lui, dans lequel il est mentionné la nécessité d’effectuer 12 fois Djaouharatou-l-Kamel et non plus 11. Or, Sidi Hajj Ali Tamacini (qu’Allah l’agrée) a été désigné officiellement par Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) comme son successeur dans la maîtrise de la Tariqa, et tuteur de ses deux nobles enfants. Il a été attesté, par l’unanimité, son obtention du degré de Pôle (Qoutb), son mérite est connu, nous n’allons point nous attarder sur l’étendue de sa valeur.

Parmi les arguments qui confirment encore cette abrogation sans aucune ambiguïté, c’est l’unanimité des agissements des grands compagnons de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et piliers de cette Tariqa tels Moulay Mohamed ben Abi Nasr el Alawi, Sidi Hajj Abdelwahhab ibn El Ahmar, Sidi Mohamed El Ghali, Sidi Taïeb Sefiani, Sidi Ibrahim Riyahi (qu’Allah les agrée).

Ainsi, tous les compagnons de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui ont survécu après lui, ainsi que ses deux nobles enfants, tous les Mouqadem qui ont été désignés par Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ou par l’un de ses grands compagnons, tous les grands savants reconnus de la Tariqa qui ont succédé aux compagnons, et ce, de leur époque jusqu’à nos jours, tous ont été et sont unanimes sur le fait que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a remplacé les 11 récitations par 12 à la fin de sa vie.

Tous ont suivi et accompli ses enseignements, hormis le mystérieux Mouqadem originaire de Touat qui aurait affirmé le contraire. Aucun d’entre eux n’a objecté sur le fait que c’est 11 récitations qui sont enseignées dans le Djawahirou-l-Ma’ani, car tous savaient que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a changé les 11 récitations par les 12 et ils l’ont suivi comme à leur habitude.

Aussi, même si l’information donnée par le mystérieux Mouqadem de Touat sur les 11 récitations s’avérait authentique, il ne fait aucun doute que l’information sur les 12 l’est aussi. Alors, la règle lorsque deux sources authentiques s’opposent comme cela arrive parfois en ce qui concerne les paroles prophétiques, il faut opter sur la plus authentique des deux. Dans notre cas de figure, nous avons d’un côté un rapporteur n’ayant pas vécu au côté de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et ne l’ayant pas connu, et de l’autre, des milliers de rapporteurs parmi lesquels se trouvent ses propres enfants, l’élite de l’élite de ses compagnons, et des sommités parmi les savants de la Tariqa qui sont des références incontournables et reconnues.

Le choix est clair pour une personne qui ne se laisse pas aveugler par la passion, mais qui ne recherche que la vérité. À cela, il faut prendre en compte que les autres Mouqadem qui ont été autorisés par Sidi Tahar Bouteïba (qu’Allah l’agrée) de Tlemcen, accomplissent la récitation de 12 Djaouharatou-l-Kamel contrairement à notre mystérieux Mouqadem de Touat qui l’aurait reçu à onze par le même compagnon.

Enfin, l’autre argument qui est avancé, et non des moindres, c’est la chaîne ininterrompue des Chouyoukh et Imam désignés dans la Zaouiya El Koubra de Fès, depuis l’époque du décès de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), chargé de perpétuer l’œuvre et l’enseignement authentique de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) tel qu’il l’a laissé à sa mort.

C’est une chaîne de garants qui a justement empêché l’introduction et les dérives vers les innovations, qui parfois, s’infiltrèrent dans d’autres régions reculées. Ainsi, la Zaouiya Tidjaniya El Koubra de Fès fut toujours un repère d’authenticité à laquelle se référèrent bon nombre de savants. En effet, les chaînes de garants sont la spécificité de notre noble religion qui s’étend à tous les domaines de la science et par laquelle fut préservée l’authenticité des informations rapportées. Voici, cité à la suite, cette chaîne de garants pour l’Imama et pour la fonction de « Cheikh Zaouiya » :

Imam à la Zaouiya El Koubra de Fès :

Depuis la construction de la Zaouiya en 1215, c’est Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui dirigea la prière jusqu’à son décès en 1230 H.

– Puis, ce fut le majestueux Chérif Sidi Taïeb Wadghiry, connu sous l’appellation de Sefiani, qui dirigea la prière jusqu’à sa mort survenue en 1259 H.

– Puis, ce fut le Chérif Moulay Tahar, fils du grand Connaissant Moulay Mohamed ben Abi Nasr El ‘Alawi, jusqu’en 1300 H.

– Puis, ce fut Ahmed ibn Ahmed Kala Bannani, jusqu’en 1306 H.

– Puis, ce fut Hajj Abdsalem Kanoun, jusqu’en 1326 H.

– Puis, ce fut le Chérif Ahmed Khayyat, jusqu’en 1365 H.

– Puis, ce fut Cheikh Idriss El Iraqi, (qu’Allah prolonge sa vie) jusqu’à ce qu’il dût se démettre pour des raisons personnelles.

Machayikh de la Zaouiya El Koubra de Fès :

Après Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), ce fut Sidi Abou Ya’za, fils de Sidi Hajj Ali Harazim, jusqu’à son décès en 1273 H.

– Puis, fût désigné Moulay Tahar El Alawi, jusqu’à son décès en 1300 H.

– Puis, ce fut Sidi Ghali, fils de Sidi Moussa ibn Ma’zouz, jusqu’à son décès en 1316 H.

– Puis, ce fut Moulay Taïeb, fils de Sidi Ahmed fils de Sidi Taïeb Sefiani, jusqu’à son décès en 1357 H.

– Puis, ce fut Moulay Ghali Sefiani, jusqu’à son décès en 1367 au mois de Rajab.

– Puis, ce fut Cheikh Idriss El Iraqi (qu’Allah prolonge sa vie), jusqu’à ce qu’il dût se démettre pour des raisons personnelles.

Cette fonction est désormais assumée par la descendance de Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret).

3- Enfin, le dernier avis, qui est celui auquel nous adhérons personnellement, est celui qui prône que la récitation authentique est la récitation par 12, mais qui n’invalide pas pour autant celle accomplie par 11, il la tolère. Cet avis est suscité dans le but de ne pas marginaliser une partie de nos frères dans la voie et afin de calmer les tensions, les conflits qui sont malencontreusement survenus entre disciples d’une même voie. En fait, c’est la solution du moindre mal. En effet, cette divergence entre 11 fois et 12 fois ne justifie en aucun cas la violation du caractère sacré du musulman.

Aussi, étant donné que d’une part, les 11 fois ont bien été effectuées dans la Tariqa à une certaine époque et que d’autre part, certains ont pensé, même si c’est par manque d’information, qu’ils se devaient de l’effectuer 11 fois pour authentifier leur conformité à l’enseignement de la voie, de ce fait, par cette intention, il est préférable de tolérer l’accomplissement des 11 fois. Cela étant dit, cette position n’est point une invitation à choisir indifféremment entre les 11 fois ou les 12 fois, car le disciple se doit de s’instruire au sein de la voie afin de suivre ce qui est le plus authentique possible.

De plus, le disciple qui a été instruit, son seul souci n’est point de prendre une position partisane de par son choix, c’est-à-dire en pensant que s’il choisit de le faire 11 fois c’est qu’il soutient Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée) et par contre en le faisant 12 fois, il se serait opposé à lui. Une telle attitude est incompatible avec l’enseignement pur de cette voie prophétique. Certainement, pour nous, il ne fait aucun doute que le seul souci de Cheikh Hamahoullah en revenant à la pratique des 11 fois était de se conformer à ce qu’il pensait être le plus authentique à son époque selon les dires du mystérieux Mouqadem de Touat. Il n’aurait pas hésité à changer de position aujourd’hui, en revenant aux 12 fois, s’il constatait que tels étaient bien les derniers actes de son maître bien-aimé Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) à sa mort.

En effet, il ne suivait point une passion aveugle dominée par la nécessité d’avoir raison, non, son seul souci était d’être le plus fidèle possible à celui qui fut choisi pour être le dépositaire de cette Tariqa Ahmediya bénie, notre maître le Pôle Caché, détenteur de la station inégalée et inégalable pour tout Waly jusqu’à la fin des temps, Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret).

Or, malheureusement, peu sont ceux à notre époque qui ont un amour sincère assez fort envers Seïdina Ahmed Tijani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) au point de ne pas hésiter à se conformer avec satisfaction à l’ensemble de son enseignement sans laisser s’y interposer toute considération de fierté, d’esprit partisan, d’orgueil, de coutumes tribales et autres aberrations qui ne sont point l’apanage des grands maîtres, tel Cheikh Hamahoullah (qu’Allah l’agrée), ni de ceux qui veulent cheminer vers Allah.

Voilà, cher frère, en espérant avoir été aussi clair que possible, recevez toutes nos salutations et sachez que nous restons à votre entière disposition pour vos questions.

Zaouiya Tidjaniya El Koubra d’Europe